Ma démarche de carnettiste

Chacun de mes carnets personnels fait le choix d’une réflexion différente tant sur la forme que sur le fond. Je ne systématise jamais  ma démarche de carnettiste, je ne veux pas m’enfermer dans une sorte de logique-conviction sur le thème, le contexte, la technique ou le message. La pratique du carnet est pour moi, un terrain d’expérimentation, de liberté mais qui est systématiquement restreint et pensé à chaque thématique choisie, de façon bien distincte et nouvelle, et cela dès sa conception.

Les décisions de démarrage d’un carnet-mémoire porte tout d’abord sur le choix du papier et sur la taille du carnet lié à l’histoire du lieu ou de l’événement, puis, sur les techniques et modes  de narration texte-images (tailles des images agencement entre elles et comment intégrer les textes s’il y a lieu de le faire), ton du carnet.

Toute petite il y avait des semblants de carnets de route, ou je gribouillais des schémas, des vues des lieux visités… Mais le premier carnet était un vrai journal intime suivi pendant près de vingt ans. De nombreux tomes témoignent de mon espoir de lire le déroulé des choses… Il y manquait l’image. Mon carnet de Pologne est un ensemble de portraits de ville en noir et blancs tirés dans des conditions précaires sur de grands papier photo jaunies, la reliure composés d’articles sur les conditions de vie en Pologne, le mois de la chute de Berlin en 89.

Le carnet du métro est une suite  de croquis remontés en carnets. Croquis pris sur le vif d’un an de déplacements en métro. Trois coups d’œil chaque fois et un croquis au feutre fin… plus tard photocopié sur papier de couleur et entièrement recolorisé (gouaches, feutres de couleurs et collages de tissus et matériaux) pour créer une fiction à partir de tous les personnages rencontrés sur place. Le carnet de Londres est un carnet d’adresse et journal de bord sur 15 ans intégrant 4 voyages différents dans la Ville, des croquis occasionnels le complètent. Le carnet d’Italie est un carnet traditionnel – le premier peint à l’aquarelle – complété de bic sur un petit carnet de cuir au papier Fabriano acheté sur place, et vante les charmes du pays.

Le carnet de Budapest et de Bucarest est un seul et même grand cahier de papier aquarelle – car faisant partie du même périple  – où mémoire et croquis couleur pris-sur-le-vif sont mêlés à des souvenirs collés. Quelques aquarelles  furent produites en série, la semaine de retour du court séjour, pour figer les émotions du souvenir immédiat, elles complètent les impressions du périple.

Le carnet de Brest  a été conçu en résidence à Brest et m’a permis de créer un palimpseste, intervention sur un très vieux livre « récit de voyage », pour une écriture contrariée jouant sur les strates perdues de la ville, explorant également tous les interdits de l’édition (superpositions de bribes de carnets divers de papiers collés, pliages fous, ajouts de feuille dorée et argentée, et de matières diverses). Ce grimoire de Brest est un livre-objet sans illustration,  sorte de catalogue d’idées créatives à des fins pédagogiques pour les scolaires, il marque aussi le début d’une série de beaux rendez-vous annuels au festival « carnets d’Ici et d’ailleurs » (dont j’assure depuis la direction artistique).

Mon mariage suscita un joyeux pèle-mêle de couleurs qu’un carnet aux pages multicolores tenta d’organiser : entre photos de toutes tailles, repeintes  ou scénarisées et de nombreux ajouts d’objet propres à l’univers excentrique de ces journées de festivités, c’est un vrai livre objet mais sans aucun texte ni illustration…

Un voyage improvisé à Cuba fit l’objet de multiples carnets emportés pour être peints à l’aquarelle et crayon sur place selon les conditions d’exploration de la ville, certains grands pour les portraits d’autres plus petits pour les croquis et que ce carnet fut complété de quelques paysages manquants après coup pour l’illustration du roman que j’écrivis (« Le journal de Zoé Pilou à Cuba », paru chez Mango Jeunesse).

Ma maternité fut l’occasion d’une performance dessinée, puisque j’ai voulu commencer au tout dernier monitoring le jour de mon accouchement, que j’ai repris le stylo noir de la narration illustrée dès le lendemain, pour ne finir que 120 doubles pages plus tard… ce carnet de maternité n’est pas sensé être fini… il n’est qu’inachevé.

Les carnets de St-Pétersbourg ont été nourris de 6 mois dans le pays, les carnets choisis étant petits et le papier à gros grain, je n’ai pas pu faire de vue générale. C’est un mixte d’écritures, de collages de papiers du quotidien et autres souvenirs intégrés dans des aquarelles de couleur très vives, l’aquarelle trouvée  sur place. Une thématique par double-page comme pour le carnet de maternité.

Depuis, une performance en classe lors d’une semaine d’animation a donné lieu à un carnet de portraits de classe, un séjour en festival à La Plagne, un carnet de montagne, une résidence dans le Perche, un carnet du Perche géant conçu sur le vif  mais à l’acrylique et pastels sur papiers de couleur de grande taille. Certains autres carnets sont à peine commencés et correspondent à des explorations que je rêve d’avoir le temps de faire sur des thématiques qui me sont chères. Tout ce travail de création de carnets sert à alimenter une réflexion globale qui sert de base à des travaux divers, parfois exposition de peintures (comme pour l’exposition « enfance en russe » qui fait suite aux carnets de St-Pétersbourg), parfois animations ou rencontres…

Carnets Existants  – Exposition et/ou tirage limité

  1. Métro Parisien
  2. Londres
  3. Pologne
  4. Italie
  5. Budapest
  6. Bucarest
  7. Brest
  8. Carnet de mariage
  9. Cuba
  10. Maternité
  11. St-Pétersbourg
  12. Perche
  13. La Plagne